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jeudi 27 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Débriefing

Jazz
Finalement quels sont les points positifs et négatifs qui ressortent de cette 9ème édition du festival Éclats d'émail ?
Tout d'abord les points positifs, une impressionnante diversité de styles, d'artistes et de formations. En passant des vocalistes, aux soufflants, de la guitare gypsy à l'accordéon, de la culture israélienne au jazz de la Corée du sud, la programmation du festival est super éclectique et permet de voir et écouter un véritable panorama du jazz actuel.
Ensuite c'est un réel plaisir de voir la ville vibrer au son du jazz pendant une semaine, les bars jouent de plus en plus le jeu et les institutions affichent les couleurs.
Enfin quel public ! Car on doit bien reconnaître que les artistes ont un accueil digne des plus grandes rock-stars et cela même si une portion non négligeable des spectateurs sont abonnés aux différentes salles de concerts et donc ne sont pas forcément des aficionados du jazz.
Les points négatifs sont aussi un peu liés à la programmation car s'il y a une réelle diversité d'artistes durant le festival, force est de constater que certains étaient déjà présents l'année dernière. Ainsi Shai Maestro, Lisa Simone, Élodie Pasquier, rempilaient cette année, certes avec des projets différents, mais le plaisir de la découverte n'était plus là.
Ensuite même si les musiciens que l'on a pu découvrir sont excellents, j'aurais apprécié voir une tête d'affiche. Mais j'ai ma petite idée là dessus, l'année prochaine étant celle des 10 ans du festival, Jean Michel Leygonie se réserve peut-être un peu ! Ou alors, peut-être que la date du festival ne coïncidait pas avec l'agenda surchargé des stars du jazz.
Éclats d'émail est un beau festival avec la possibilité de rencontrer les artistes, d'assister à des conférences, de voir des expos photos. C'est une grosse organisation et un véritable sacerdoce de la part du staff. Chapeau l'équipe et continuez ce travail qui permet à Limoges de se faire une place dans les villes qui comptent pour le jazz.
En conclusion il ne manque plus à ce festival qu'un tremplin jazz. Ce serait vraiment intéressant de voir sur scène 4 ou 5 artistes avec un programme court venant concourir pour obtenir une résidence à Laborie avec à la clef un enregistrement.
Je suis sûr que cette idée a déjà traversé l'esprit de Jean Michel Leygonie, alors vivement les prochaines éditions du festival Éclats d'émail.



  

mercredi 26 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Itamar Borochov

Jazz
Dernier concert auquel j'assiste pour cette 9ème édition du festival Éclats d'émail. Il s'agit du trompettiste Itamar Borochov et son quartet venu défendre sur scène la plupart des morceaux de son album Outset. Autour du trompettiste, on retrouve son frère Avri à la contrebasse et au oud, Yonathan Avishai au piano et Jay Sawyer à la batterie.


Borochov, joue avec un son légèrement voilé qui est du plus bel effet. L'inspiration des compositions et des chorus provient des artistes ayant gravé des galettes somptueuses dans les années 50-60. On pense évidemment au Miles d'avant la période électrique, à Lee Morgan, Freddie Hubbard et surtout à Clifford Brown.


Ainsi une composition comme Samsara rappelle les titres les plus populaires de ces maîtres du pavillon dans lesquels la pulsation ternaire laisse affleurer un groove que vous ne pouvez endiguer et qui envahit votre corps jusqu'à votre pied qui bat la mesure de manière imperceptible.
Borochov a un bon son et ses chorus sont enlevés, il ajoute à ces compositions fortement inspirées des années 60 de son histoire familiale. En effet la musique traditionnelle de ses origines se mélange à des tourneries plus afro américaines laissant l'auditeur voyager à travers l'Orient.

Ainsi pour appuyer le propos du musicien, son frère Avri, troque la contrebasse contre le oud. Ce mélange renvoie immédiatement à Ibrahim Maalouf, passé maître dans cette recette savante. Maalouf arrive pour moi à un mix plus abouti que Borochov. Mais ce dernier n'a pas enchaîné les enregistrements comme a pu le faire l'insatiable Ibrahim. L'expérience joue certainement une grande importance.



Itamar Borochov joue donc avec son frère Avri. Certaines fratries sont devenues très célèbres dans le jazz, rappelez-vous les frères Adderley et leur quintet prestigieux ou les frères Brecker, les chevaliers de la fusion... Ici, Avri Borochov reste dans l'ombre de son frère pour plusieurs raisons. Tout d'abord son jeu de contrebasse est assez grossier, le raffinement n'a pas sa place et encore moins la sensibilité. Cela se vérifie ensuite lorsqu'Avri Borochov prend le Oud avec une maîtrise de l'instrument plus que modeste. Clairement l'un tutoie les étoiles, alors que l'autre est resté sur la terre ferme à regarder.

Les autre musiciens se défendent bien, Jay Sawyer avec une carrure de videur de boîte de nuit fait un très bon concert. Le pianiste accompagne bien le trompettiste, mais je n'aime pas la construction de ses soli. Le manque de spontanéité de ses chorus m'a déçu.
En conclusion, un concert vraiment sympa pour les amoureux des grandes heures du jazz afro américain. Le mélange des cultures voulut par Itamar Borochov est réussi et l'on découvre un musicien accompli. Son frère va devoir travailler pour se faire un prénom car Borochov rime avec trompettiste de talent...   pour l'instant ....
Note: 14/20



mardi 25 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Giovanni Mirabassi

Jazz
Encore un pianiste dans cette neuvième édition du festival d'éclats d'émail, Giovanni Mirabassi. C'est toujours intéressant de voir à quel point avec le même instrument, on peut obtenir une si grande diversité de styles, de compositions et bien entendu d'improvisations.
Mirabassi joue ce soir dans la formule consacrée du trio avec Gianluca Renzi à la contrebasse et Lukmil Perez à la batterie.

Dès les premières notes on comprend que l'on a affaire à un pianiste habitué des clubs. Mirabassi à du affronter nombre de jams dans les clubs enfumés des capitales et avoir une connaissance exceptionnelle des standards du jazz. On sent dans son jeu et ses compositions l'importance de la ligne mélodique. Ses improvisations restent toujours très fluides et d'une construction sans faille.
Mirabassi, c'est le pianiste avec qui vous avez envie de jouer, car même si c'est un bon instrumentiste, c'est le jazz qui l'intéresse. La musique comme instant de partage avec ses musiciens et avec le public.

 
Qu'importe finalement le flacon pourvu qu'on ai l'ivresse. Ainsi Mirabassi affiche un sourire jouissif quand le contrebassiste fait une citation du Boogie Stop Shuffle de Mingus dans un solo, ou bien, il change la setlist du concert car il a envie de jouer The Man I Love de Gershwin qu'il a entendu siffloté par le directeur du festival l'accueillant à la gare de Limoges. L'hédonisme musical de Mirabassi est agréable à écouter mais les autres membres du trio ne sont pas en reste.


Gianluca Renzi est sans conteste le contrebassiste de ce festival. D'abord déconcerté par l'arbalète électrique qui lui sert d'instrument, je suis surpris par la qualité du son qui est très profond. Un instrument sans caisse avec une telle résonance c'est assez étonnant. Le contrebassiste, joue remarquablement bien. Nuances, sensibilité, précision rythmique, qualité du son et des soli sont au rendez-vous sur chaque morceau. Belle claque, Gianluca Renzi illumine la scène.


En revanche, je suis moins enthousiasmé par le batteur. J'ai ressenti comme une absence de sa part pendant une bonne partie du set. Il n'était pas en phase avec Mirabassi et Renzi. La fatigue due à l'enchainement des dates peut-être ? Bon musicien, sensible, il n'a retrouvé l'osmose avec le reste du trio qu'en fin de set. Dommage.


En conclusion, Mirabassi est un fervent défenseur de la mélodie. Que ce soit dans ses soli ou dans ses compositions, la mélodie est sa préoccupation principale. Avec sa formation en trio, il nous entraîne dans un club de jazz et nous transporte aux plus belles heures de la note bleue.
L'attachement du pianiste pour le lyrisme dans ses compositions donne envie de le voir jouer en formation plus importante. Un album avec un trompettiste et un saxophoniste serait le bienvenu.
Note: 13/20



 

vendredi 21 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Paul Lay - Mikado

Jazz
Enfin le jazz français a trouvé son beau gosse ! Oui, Paul Lay est beau sans aucun oxymore. Mais que nous vaut cette bonne mine Paul (amis de la contrepétrie...) as t-on envie de lui demander. Et une partie de la réponse se trouve certainement dans le quartet qu'il a réuni pour l'album Mikado. En effet autour de lui prennent place Antonin Tri Hoang au saxophone alto et à la clarinette basse, Dré Pallemaerts à la batterie et Clemens Van Der Feen à la contrebasse.
Le pianiste a trouvé un bel équilibre avec cette formation, on passe de compositions très "à la mode" du jazz contemporain, à des morceaux plus personnels, en passant par des moments d'une infime délicatesse et sensibilité quand Dré Pallemaerts abandonne ses collègues et que Antonin Tri Hoang attrape sa clarinette basse.


Paul Lay est à l'aise dans tous les jeux, alternant lyrisme, jeu puissant de block-chord, virtuosité de la main gauche complètement indépendante. Mais ce qui est vraiment intéressant à voir et écouter c'est l'alchimie avec le batteur. Il existe une complicité sans faille entre ces deux là. Il prennent un plaisir à jouer ensemble qui transpire dans chaque chorus. C'est assez drôle d'ailleurs de comparer leurs allures respectives: D'un côté le pianiste propre sur lui, qui donne l'apparence d'un parfait gentleman et de l'autre un batteur aux cheveux long à qui il ne manque que la chemise de bûcheron pour compléter la panoplie du look grunge !

  
Mais l'apparence est une chose, le talent, une autre car cette complicité et ce dialogue constant entre les 2 instrumentistes n'est possible qu'avec une grande virtuosité. On ne peut dialoguer si on ne parle pas la même langue et force est de constater que Paul Lay et Dré Pallemaerts s'entendent à merveille.
Cette amitié, qui, je pense dépasse la rencontre musicale, éclipse un peu le talent du contrebassiste qui pourtant fait du bon travail tout au long du set. Jeu à l'archet très propre et très beau solo sur une ballade de début de concert.


L'alchimie étant tellement présente entre le batteur et le pianiste, difficile pour le contrebassiste de trouver sa place. De même, le saxophoniste Antonin Tri Hoang, apparaît comme une pièce rapportée face à ce couple. Cependant le saxophoniste que j'avais découvert dans une autre édition d'Éclats d'émail avec l'Orchestre National de Jazz sous la direction de Daniel Yvinec ne reste pas sur le bord de la route. Il enchaîne les thèmes avec une certaine maestria et nous livre des soli bien sentis. Bon technicien je trouve qu'il devrait se lâcher un peu plus, je me suis surpris au moment de ses soli à chantonner une note harmonique que j'aurai bien voulu entendre. Son introversion apparente se lit dans son jeu. Ce qui n'est pas forcément perceptible à l'écoute d'un cd, ne peut être caché sur scène. On a envie de générosité, que ce saxophoniste nous chahute en nous étonnant.

Bien entendu, je chipote car Antonin Tri Hoang a bien jouer tout au long du spectacle et il est un des piliers des saxophonistes français de la scène jazz actuelle.
En conclusion, un bon concert avec cette jeune garde du jazz, les compositions ne sont pas toutes du même niveau mais Paul Lay sait créer un set efficace alternant les compositions, les reprises, les ballades et les rythmes plus enlevés.
Enfin, Mikado dont la plupart des morceaux on été joué sur scène a été récompensé dans la catégorie jazz par le grand prix du disque de l'académie Charles Cros.
Le meilleur moyen de féliciter Paul Lay de ce prix est donc de se procurer son disque paru sous le label Laborie Jazz. En plus Mesdames, vous aurez ainsi une magnifique photo du pianiste (haaaa qu'il est beau).
Note: 15/20
Ecoutez Mikado ici

jeudi 20 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Nasheet Waits - Equality Quartet

Jazz
Deuxième concert auquel j'assiste, Nasheet Waits qui vient défendre des titres qui vont certainement sortir sans tarder sur le label Laborie Jazz. C'est une formation en quartet dans laquelle on retrouve classiquement un pianiste Aruan Ortiz, un contrebassiste Mark Helias, un saxophoniste Darius Jones et à la batterie Nasheet Waits.
Après avoir ouïe la voix de Louis (Winsberg cf article ici) faisant wah-wah, c'est un jazz beaucoup moins conventionnel qui allait frapper aux portes de mes esgourdes. Tour à tour surpris, décontenancé, admiratif et souvent émerveillé, on ne peut pas dire que la voie musicale qu'a choisi Nasheet Waits laisse indifférent.


Waits défend l'idée selon laquelle chaque musicien du quartet apporte sa pierre à l'édifice, le nom d'Equality Quartet trouve ici sa justification. Cette notion d'égalité pourrait être galvaudée dans certaines formations mais c'est vrai que le jazz qui nous est présenté, s’affranchit des structures classiques. On peut aisément comparer l'apport de chaque musicien à une touche de couleur qu'ils viendraient poser sur une toile, on est dans l'expressivité de sentiments, sensations.
Cela montre une évidente maîtrise technique de l'instrument mais aussi une assimilation parfaite de la culture musicale jazz. On a l'impression qu'ils ont tous au moins 30 ans de carrière derrière eux.


D'aucuns diront que c'est une musique élitiste et il faut bien le reconnaître... ils ont raison. Car rares sont les non-musiciens à décrypter le message musicale dans toute sa force. Il faut avoir une notion, même restreinte, de l'harmonie, du rythme, de la pratique instrumentale pour prendre un réel plaisir à écouter ces virtuoses.
Mais revenons aux musiciens qui font preuve d'un immense talent. A commencer par le saxophoniste Darius Jones dont l'apparente bonhomie contraste avec un jeu puissant, une maîtrise technique exceptionnelle des harmoniques, du growling, des doigtés alternés mais surtout un son que n'importe quel saxophoniste voudrait avoir.

  
Le pianiste Aruan Ortiz ainsi que le contrebassiste Mark Helias sont aussi très techniques. Le premier base la plupart de ses chorus sur des motifs rythmiques, je regrette de ne pas avoir pu mieux entendre sa main gauche car mon placement dans la salle pénalisait la sonorisation du piano.
Le second enchaîne les soli avec dextérité que ce soit à l'archer ou aux doigts. Je trouve que son jeu est assez froid, cela manque de rondeur, même s'il ne recherche pas le groove pour cette musique, on sent que ce n'est pas instinctif chez lui. Peut-être les travers d'une formation essentiellement classique ?
Pour finir, le batteur et fondateur de ce quartet nous prouve tout au long du set une aisance dans tous les jeux. Du toucher sensible de la cymbale à l'explosion de la caisse claire, il marie habilement les sensations. C'est un véritable esthète de la batterie, chaque frappe sert la musique, pas de fioriture.
En conclusion, un concert impressionnant mais deux détails me chagrinent, d'une part, la musique de Nasheet Waits et de son quartet est trop hermétique pour le novice et d'autre part, je regrette qu'ils n'aient pas repris un standard. Une reprise saucissonnée à la méthode Waits aurait certainement enchanté le public.
Note: 13/20


mardi 18 novembre 2014

Eclats d'émail 2014 / Louis Winsberg - Gypsy Eyes

Jazz
Concert d'ouverture officielle du neuvième festival Éclats d'émail à l'opéra théâtre. Le président du festival fait son petit discours et le spectacle commence par un guitariste en solo Rocky Gresset.
Le jeune homme est virtuose, sa guitare acoustique parfaitement sonorisée et le silence de la salle montre que le guitariste dès les premières notes à su captiver son auditoire.


Ensuite entre en scène Louis Winsberg qui nous précise que le programme du soir tournera autour de l'histoire de la guitare dans le jazz en rendant hommage aux plus grands guitaristes du genre, que ce soit Wes Montgomery, George Benson, Paco de Lucia, John Mclaughlin et bien entendu Django.
Le spectacle n'est donc pas un trio de guitares manouches pendant 2 heures. C'est un peu ce que je craignais en voyant l'affiche.
Le concert est donc très éclectique, mais il est vrai, centré sur la 6 cordes. Après quelques morceaux, Rocky Gresset prend la guitare électrique, Louis Winsberg la "guitare bleue" et une section rythmique composée de Stéphane Huchard à la batterie et Jérôme Regard à la contrebasse - basse électrique viens compléter la formation.
Sur un drive impeccable du batteur nous voilà parti sur un morceau de Wes Montgomery, la virtuosité de Rocky Grasset reste présente en mode électrique, et le plaisir de voir jouer ces musiciens est communicatif.
Jean Marie Ecay rejoint à son tour la formation et c'est sur un morceau de jazz fusion de Miles Davis qu'il donne avec Louis Winsberg l'étendue de sa maîtrise musicale. Ce morceau est véritablement l'apogée du concert avec des soli très bien construits et une section rythmique en grande forme.
Pour le titre suivant, Ecay impose un blues dans lequel être en arrière du temps prend toute sa signification, la construction du morceau est assez classique mais la réalisation est intéressante.
C'est Antonio El Titi qui enchaîne en solo avec un morceau hommage à Paco de Lucia. La salle exulte à la fin du titre. Ce musicien est un véritable prodige, pour le coup, 2 heures de musique manouche par El Titi, ce n'est pas assez !

 
Après avoir joué en duo avec Winsberg plusieurs titres dont une marseillaise joliment détournée, la formation se retrouve au complet pour les derniers titres du set.



Au final, Louis Winsberg est un très bon musicien, un amoureux de la guitare et de ceux qui la pratiquent. Il nous transmet cet amour par un hommage aux grands artistes qui ont été des piliers pour sa culture musicale. En toute humilité, les musiciens qui l'entourent jouent merveilleusement bien et prennent du plaisir à partager leur musique avec le public.
Beau spectacle, le public était conquis et le sourire et la bonne humeur d'El Titi resteront dans les mémoires.
Un bémol tout de même sur l'utilisation de la guitare midi pour faire des nappes de violon ou des accords d'orgue, Monsieur Winsberg, les années 80 sont loin maintenant et ce n'est pas la peine de conserver les pratiques sonores qui ont plombé un maximum de titres de cet époque.
Note: 15/20







vendredi 31 octobre 2014

Le piano est une percussion

Jazz
Dernier jour d'octobre pour un post de jazz qui ne fête pas Halloween. Non rien ne peut faire peur dans cet album Alive paru en 2014, la pochette n'est même pas orange. Bon d'accord, la coiffure de la pianiste Hiromi Uehara peut faire trembler le coiffeur de quartier habitué à sa teinture bleue pour mamies et qui ne doit pas comprendre le modernisme de cette explosion capillaire. De même, la mamie aux cheveux bleus serait fort dépité de voir ce que l'on peut faire avec ce meuble en bois noir qui l'enquiquine car il faut le nettoyer quotidiennement tant il donne l'impression d'attraper toutes les particules de poussière. Finalement, l'usage principal du piano chez la mamie, que l'on pourrait croire fan d'avatar, est console pour vase avec fleurs en plastique reposant sur napperons brodés multicolores. La grand-mère d'Hiromi ne devait pas avoir les cheveux bleus car la façon de jouer du piano de la jeune femme est plutôt impressionnante d'énergie, la poussière ne devait pas avoir le temps de se poser sur la laque couleur ébène. Avec Alive, Hiromi est sur une formule trio, piano, basse, batterie, vue et revue me direz-vous... C'est vrai que pratiquement tous les grands pianistes de jazz ont livré en trio des oeuvres passées à la postérité. Que ce soit Keith Jarett, Ahmad Jamal, Brad Meldhau (le Michel Sardou du piano, il fait toujours la gueule), EST, ... La liste est trop longue. Mais là où dans la plupart des cas, le pianiste s'engage sur des compositions laissant une grande place au lyrisme, Hiromi nous rappelle que le piano est un instrument de percussion.
Ce trio formé par Hiromi, Anthony Jackson à la basse et Simon Phillips à la batterie est pour le moins dynamique, ça envoie le bois ! D'ailleurs pour ma part, le son des toms de batterie est un peu trop fort par rapport à la balance de l'ensemble, cela donne l'impression que le batteur défonce les peaux de ses futs à chaque frappe !
Hiromi est une grande virtuose, écoutez la vélocité de ses phrases, les appogiatures qu'elle distille sur la majorité de ses notes, l'incroyable indépendance de ses mains, c'est un génie !
Mais bien souvent le problème des grands techniciens, virtuoses de la musique c'est qu'ils n'arrivent pas à faire passer l'émotion et que leurs compositions sont si techniques que le commun des mortels ne les comprend pas.
Et là je recrie au génie (rien à voir avec le froid) car sur Alive, les compositions tiennent la route, que ce soit: Warrior, qui passé l'intro, nous renvoie à une musique de polar des années 70, Seeker, une ballade quasi pop ou bien encore la ballade très sensible Firefly.
Et l'émotion dans tout ça ma pauvre dame ? Hé bien il y en a aussi ! Que ce soit la joie de se faire un blues revisité avec Spirit et ses jouissives pêches. L'énergie d'un Alive, le lyrisme d'un Wanderer, la tension d'un Player, Hiromi passe par toutes les palettes de l'émotion et dans chaque morceau on se demande où la pianiste va nous entraîner. Le bassiste impose son groove et le batteur, hormis ce problème de sonorisation, converse réellement avec la pianiste.
Alive est une réussite, Hiromi est au sommet de son art, un véritable pied à écouter. Alive ne plaira peut-être pas à mamie mais c'est un incontournable de cette année 2014, à écouter very loud ! De toute façon mamie elle est sourde...
Note: 17/20
Ecoutez ici    
 


samedi 11 octobre 2014

L'épouvantail et la formule magique

Blues Hip-Hop
Je vous arrête tout de suite, l'appellation blues hip-hop n'est pas de moi mais du groupe lui-même qui revendique haut et fort ce crossover.
Scarecrow, cocorico, est un groupe français originaire du sud de la France. Porté par un single tubesque The Well sorti en fin d'année 2013, ce n'est que quelques mois plus tard que sort l'album Devil & Crossroads. Les quatres musiciens restent fidèles à l'essence de leur musique mixant efficacement des lignes de blues jouées à la guitare par Slim Paul, des platines et du chant le plus souvent rappé par Antibiotik Daw, de la batterie par The Pap's et enfin de la basse par Jamo.
On pouvait bien croire que ces toulousains avaient trouvé la formule magique qui leur ouvrirait les portes du succès à l'écoute de l'EP de 2013... Mais Devil & Crossroads apporte des précisions sur les ingrédients de la formule. Car tous les titres ne fonctionnent pas. Ainsi si sur l'ensemble de l'album l'équilibre entre le blues et le hip-hop est respecté, donnant naissance à des titres de bonnes qualités: Evil & Crossroads, Morning Rooster, My Lowd, Néant, All Now, il faut bien reconnaitre que lorsque le blues s'éloigne et laisse la place à un rap plus conventionnel, l'alchimie n'est plus là: Dans Mes Poches, A Kind Of Sign.De même sur B.M.F, la construction et les gimmicks rappellent trop les titres à la mode. Enfin un titre comme Ain't Got No Choice (But Buying You) montre l'écueil d'un rap collé derrière un chant blues. Même si le titre avec sa progression est au final attachant, on a vraiment l'impression que le rap du début de morceau tombe là comme un cheveu sur la soupe. En gros, on imagine que c'est: "bon les gars maintenant c'est à moi de jouer parce que ça fait 1 heure que j'attends !". Pour terminer la critique acerbe, l'anglais avec un fort accent français peut en faire fuir plus d'un et j'avoue qu'à la première écoute je grinçais des dents. Puis après plusieurs passages, on s'habitue et cela donne même une coloration encore plus blues, en appuyant sur les racines, l'origine du chanteur, son identité.
Sur Devil & Crossroads, la formule qui pour moi reste la plus pertinente est celle des 3 premiers titres ou il y a un très bon équilibre et une interaction évidente entre les musiciens.
Pour finir, beau travail sur la pochette avec les textes des chansons ce qui devient de plus en plus rare, et une ambiance de film de série Z, morts-vivants me rappelant l'excellente BD: Apocalypse sur Carson City par Guillaume Griffon.
Comme d'habitude, allez les voir sur scène, j'ai loupé leur venue dans la région ou ils partageaient la scène avec Heymoonshaker, et apparemment c'était d'anthologie...
Note: 12/20
Ecoutez ici 
Ecoutez The Well ici

  
   
  

mardi 30 septembre 2014

Bart et l'odyssée d'Homère

Jazz
Il ne s'agit pas de Bart Simpson essayant d'aider son père Homer à voyager vers le pays du chocolat, mais de Jacques Schwartz Bart nous invitant à un voyage dans la culture vaudou. Le saxophoniste ardent défenseur du Gwoka guadeloupéen, mélange avec brio les rythmes et sonorités caribéennes avec l'improvisation jazz néo-bop.
Après le succès de son album Jazz Racine Haïti, il nous présente au château de La Borie, à côté de Limoges, un programme en trio. Le set de ce concert donnera lieu à un enregistrement en fin d'année.
Le ténor s'est entouré de Moonlight Benjamin au chant et de Claude Saturne aux percussions.


Cette soirée estivale ensoleillée dans le cadre des jardins du château rend propice notre esprit à partir pour un odyssée sur le bateau de la musique de Bart.
Jacques Schwartz-Bart joue avec un son très droit, la prise de son par un micro accroché au pavillon isole tous les bruits de clétage. C'est un choix assez personnel, je me rappelle que Julien Lourau se servait du bruit des clés pour lancer le rythme d'un titre sur lequel Bojan Z faisait la mélodie.
Ici pas de fioritures, juste le son du saxophone.


Le programme est très ancré dans la culture vaudou et le mysticisme se voit renforcé par la formidable chanteuse Moonlight Benjamin. Le ténor a su s'entourer d'une perle rare.
A l'écoute de certaines chansons on ne peut s'empêcher de penser au St Thomas de Sonny Rollins, ou plus récemment à David Murray et son Gwo-Ka Masters. Mais la chanteuse apporte cette dimension profondément humaine qui transcende la musique.


Le percussionniste n'est pas en reste et module son jeu à chaque instant pour appuyer le saxophoniste ou la chanteuse.
Ce concert a vraiment fait voyager l'assistance et le trio fort de son succès n'a pu quitter la scène qu'après avoir joué 40mn de plus que le programme officiel !
En conclusion, encore une fois le jazz s'enrichit des cultures et personnalités de ceux qui le créent, pour le plus grand plaisir des auditeurs.
Note: 15/20
Site de l'artiste
Ecoutez ici Jazz Racine Haïti



lundi 15 septembre 2014

Mazette !

Jazz
Il est des mots si peu usités à notre époque du tout mobile que lorsqu'on les entend, ils renvoient notre imagination à un temps lointain ou la langue française nous semblait regorger de nom, verbes, qualificatifs pleins de sonorités et de rythmes. Peut-être que dans 50 ans le "je kiffe la vibe" aura acquis ce charme désuet. Bigre! est un de ces mots qui vous place immédiatement dans un contexte historique. Cette interjection est aussi le nom d'un big band français qui a sorti en mai 2014 l'album qui nous intéresse: To Bigre! Or Not To Bigre!?.
19 musiciens qui se font entendre ! Car dans ce big band les solistes sont de très bon niveau et les compositions permettent de voyager avec, ici, un rythme cubain, là, une soul américaine matinée de funk. L'ensemble de l'album est très dansant et optimiste. To Bigre! Or Not To Bigre!? nous est livré avec 2 parties bien distinctes. Ainsi les plages 1 à 10 sont les compositions originales et les plages 11 à 20 les remix. Autant vous dire tout de suite que les remix n'ont aucun intérêt si ce n'est prendre de l'espace sonore sur un disque déjà bien chargé. Une petite vidéo d'un concert en lieu et place des dits remix aurait été du meilleur effet. Tant pis pour nous.
To Bigre! Or Not To Bigre!? s'ouvre sur Timba Para Los Gringos et les rythmes latinos nous ordonnent de bouger le bas du dos... Dès ce premier morceau la précision rythmique de la mise en place des cuivres est impressionnante. Pierre Desassis se charge du solo de sax et se sert bien de l'appui du big band pour construire son solo, belle prestation.
Funkovitch nous entraîne comme son nom l'indique sur les routes du funk. La trompette de Félicien Bouchot en solo permanent sur les riffs de trombones fait un peu trop bavardage. Le compositeur pensait bien se servir mais c'est lassant. La deuxième partie de Funkovitch double la vitesse, le saxophoniste soliste Romain Cuoq fait un solo correct mais le big band semble tourner sous ecstasy ce qui rend l'écoute peu plaisante.
Le chant de Clyde Rabatel-Zapata vient se poser sur une chanson soul assez classique: In The City. 2 choristes Thaïs Lopes de Pina et Célia Kaméni viennent appuyer le chant avec une belle réussite. Le tromboniste Jean Crozat s'occupe du solo avec aisance. Le morceau est assez classique et ne renouvelle pas le genre. On peut apprécier le travail de qualité fourni mais le tube n'est pas encore là.
Hé!, non je ne hèle pas le garçon de café, il s'agit du titre de ce quatrième morceau. Thème lancinant assez réussi avec en première partie un très bon solo de trompette par Thierry Seneau, suivi par un solo de Romain Nassini aux claviers très Zawinulesque dans l'esprit.
On enchaîne avec Top Pizza et LA grosse révélation, le saxophoniste Thibaut Fontana qui fait certainement le meilleur solo de l'album en montant crescendo dans son jeu, son rythme, son alternance de tensions relâchements, la maîtrise parfaite des harmoniques, on se régale. Pour une pizza ce ne peut-être qu'une royale !
Le chanteur revient sur CR2's Funky Lament, tout aussi classique que la première chanson avec en plus un solo de Romain Dugelay très groovy.
Jean No's Dance nous ramène sur les rythmes latinos avec Pierre Desassis au saxophone qui reprend du service. Un jeu très rythmique qui n'est vraiment pas évident à faire, n'est pas Paquito di Riveira qui veut. Mais là encore une belle réussite et un solo complètement différent du premier, ce qui montre la polyvalence du soufflant.
Hate:Love:Whatever commence comme une soul ballade quand tout le big band vient assaillir la chanteuse rageusement. Beau timbre de voix pour Célia Kameni et solo tout en rondeur pour Thibaut Fontana avant que le final ne soit submergé par un déluge de notes.
Valioud apporte des sonorités orientales, cela fonctionne même si le thème est un peu lourd.Sylvain Thomas assure un très bon solo de trombone, le deuxième à prendre le chorus est un saxophoniste: Fred Gardette. Assez lyrique, le saxophoniste semble un peu trop pris par la volonté de coller au style pour se donner à 100%.
Pour finir, Ca Va Eté?, dynamique et joyeux, une invitation au groove que vous ne pouvez pas refuser. Le trompettiste Hervé Salamone prend un solo très classique dans une première partie pour ensuite s'attaquer aux suraigües avec brio.
To Bigre! Or Not To Bigre!? doit rencontrer le succès car certes sur l'ensemble des compositions, il n'y a pas un tube qui ressort, mais l'homogénéité de l'enregistrement, la qualité des solistes (encore bravo à Fontana pour le solo sur Top Pizza), la précision rythmique et le groove sous-jacent dans chaque titre, sont des raisons plus que suffisantes pour écouter le quatrième album de Bigre!:
To Bigre! Or Not To Bigre!?. Bien entendu je vous recommande de les voir en live mais les grands ensembles rencontrent souvent des difficultés pour réunir tout le monde lors de tournées. Il vous reste quelques vidéos qui circulent sur You Tube pour vous faire une idée. 
Note: 14/20
Ecoutez ici 



samedi 23 août 2014

Massacre à la clé de sol

Jazz
Nouvelle édition du festival d'été Musiques au Musée à Limoges. Le programme s'enrichit peu à peu mais sur le plan du jazz, reste secondaire par rapport au festival Éclats d'émail qui est devenu au fil des années, un rendez-vous incontournable des mélomanes.
Ayant déjà entendu les qualités de musiciens de Vincent Maury au saxophone et de Mathieu Tarot à la trompette, je décide d'aller voir un octet qu'ils ont formé avec d'autres musiciens et qui se produira dans les jardins de l’évêché, situés derrière la cathédrale pour les non-limougeauds. La foule est au rendez-vous, certainement plus grâce à la faveur du soleil qui a enfin montré le bout de son nez en ce mois d'août pluvieux, qu'à la présence du combo fraîchement monté.
Une charmante hôtesse me tend le programme du festival sur lequel on peut lire une brève présentation des groupes ou artistes. Ainsi pour Jazz Byte, on peut lire: "... est un mini big band vocal mordant qui réunit la crème de (...)l'orchestre régional du Limousin. Ses musiciens issus d'horizons divers (...) lui procurent une "patte" et une énergie incomparables." Alléchant non ?
Les musiciens s'installent sur la scène, c'est le chanteur Gilles Favreau qui présente le groupe en indiquant qu'ils allaient jouer des standards du swing et que le groupe avait été formé à l'occasion du festival. Il essaye de plaisanter avec le public et arrive à décrocher quelques sourires. Mais c'est sur la musique que la critique va s'avérer plus acerbe car dès la première chanson, l'approximation de la mise en place rythmique du chant s'entend. Avec en plus une reprise du thème au mauvais moment.
Soyons indulgent, il leur faut peut-être un peu de temps pour s'installer dans le concert...
Les solos s'enchaînent sans grande saveur, avec un altiste Denis Gauthier qui restera aux abonnés absent des chorus, pourquoi ? Sur une grille de blues de Count Basie, ça doit pas poser beaucoup de problèmes ... Mais encore ça ce n'est qu'un détail.
Les fins hasardeuses qui me rappellent la fameuse expression des musiciens "rendez-vous à la coda", ne sont rien comparé à ce qui m'attendait. La pire interprétation d'un standard de jazz que j'ai pu voir sur scène: Lullaby Of Birdland. Le chanteur l'annonce et je me prend à la chantonner dans ma tête, puis il donne le rythme et là je me dis que c'est plutôt lent. Effectivement, la lenteur casse la pêche naturelle du morceau, les arrangements de cuivres alourdissent encore un peu le titre. Après des soli, le chant reprend et tout le monde s'arrête à la fin du couplet ! Les musiciens se regardent avec des yeux de merlans frits et après une éternité le chanteur reprend a capella de manière humoristique... C'est du grand n'importe quoi. Après ce massacre, nouveau standard: Stompin' At the Savoy. Titre que j'avais écouter la veille interprété par le big band d'Illinois Jacquet. Mauvaise coïncidence car comparé à l'excellence du big band américain, l'octet limougeaud faisait pâle figure surtout quand le pianiste Alex Jouravsky assez peu inspiré pour ses soli oublie carrément de jouer le thème ! Je ne comparais évidemment pas le niveau des deux formations mais plutôt la façon d'approcher le standard alors quand un groupe n'arrive même pas à sortir le thème ...
Sur ce morceau je crut bon de m'éloigner pour profiter des bienfaisants rayons du soleil en m'allongeant sur l'herbe. La musique lointaine ne semblait plus si mauvaise ...
De ce spectacle navrant, j'espère que Jazz Byte saura tirer les leçons car même les écoles de musiques proposent des spectacles de fin d'année de meilleure qualité.
De deux choses l'une, soit les musiciens travaillent (et il y a du pain sur la planche) soit ils arrêtent cet octet improbable.
Note: 5/20 (normalement c'était 2 mais le tromboniste Franck Théaudin a eu quelques fulgurances)



 


mardi 5 août 2014

Sax 'n' Roll

Blues
Le saxophone est l'instrument de prédilection du jazz, quelques œuvres classiques lui donnent un peu de place mais c'est le jazz qui rend à cet instrument ses lettres de noblesse. On ne peut pas voir ou entendre un saxophone sans y associer un grand nom du jazz, Getz, Adderley, Parker, Stitt, Rollins, ... et bien entendu Coltrane. Cependant le saxophone s'est aussi illustré dans d'autres styles musicaux, la soul funk est un exemple marquant avec en tête de liste une section de cuivre dont chaque musicien a fait une carrière solo importante, j'ai nommé les JB's. Maceo Parker, Pee Wee Ellis et Fred Wesley. Même si Maceo Parker ou Pee Wee Ellis se sont lancés dans des enregistrements jazz, ils n'ont rencontré le succès qu'avec la soul funk que Mr Brown leur avait transmise. Plus pop, le saxophone de Supertramp par exemple, est vraiment un élément du groupe à part entière contribuant à la mélodie et à des solos devenus cultes.
Karl Denson, fait partie de ces musiciens qui ont tourné leur carrière musicale vers le rythme & blues. Au printemps 2014 il sort avec son groupe Tiny Universe l'album New Ammo. On retrouve sur cet enregistrement Karl Denson au saxophone mais aussi sur certains morceaux à la flute traversière. Il est soutenu par Chris Stillwell à la basse, John Staten à la batterie, David Veith aux claviers, D.J. Williams à la guitare et pour la section de cuivre, Chris Littlefield à la trompette, Andy Geib au trombone et Daniel de La Cruz au sax baryton.
New Ammo commence très fort avec Grenadiers dans lequel Denson assume un solo très rock suivi de la guitare de Williams omniprésente sur l'album. Après Three Trials Of Strength moins inspiré, le groove fait son apparition avec Hang Me Out To Dry et Karl Denson au chant. Le titre éponyme New Ammo ressemble à la construction des titres de Maceo Parker. Beau travail de section de cuivre sur le thème ou en appui derrière les solistes. The Duel est un titre de la bande originale du film CC and Company. Nanard des années 70, la musique fut composée par Lenny Stack et fait partie des innombrables pépites composées pour des films et qui surpassaient largement la valeur des images !
My Baby, composition plus classique fait rentrer au chant Nicki Bluhm. La première partie du solo de Denson me rappelle les solos de Candy Dulfer.
Avec Seven Nation Army, ça se gâte, après une introduction basse, guitare qui met l'eau à la bouche, la flute de Denson vient faire retomber le soufflé. La volonté de Karl Denson de sonner rock a certainement aiguillé son choix de prendre le morceau le plus célèbre du faiseur de rock de Nashville, Jack White. Mais sa flute semble parodier la lourdeur du titre original.
Après Ski vient relever le niveau, retour du saxophone pour Denson et petit solo de trompette. Le punchy Everybody Knows That laisse place au titre Sure Shot des Beasties Boys. Là encore l'original gagne haut la main le combat. Malgorium et son riff d'hammond suivi de pèches de la section de cuivre rappelle le James Taylor Quartet (Critique d'un album de JTQ). Très bon solo de Denson et du guitariste D.J. Williams. Ce morceau est celui que je préfère de l'album. Après Cheerleader dans lequel encore une fois le guitariste tire la couverture à son avantage, New Ammo se conclue par Odysseus. Ce titre est le plus jazz de l'album, on découvre un solo de vibraphone exécuté par Mike Dillon. Le titre assez monotone bascule en deuxième partie avec l'arrivée de la guitare électrique, toujours elle, vers un style plus percutant.
En conclusion, sur New Ammo, la présence mélodique importante du guitariste fait penser que c'est un album de ce dernier sur lequel il aurait invité Denson et son groupe le Tiny Universe. C'est dommage, le saxophoniste joue parfaitement dans le style rock et ses compositions bien que classiques se laissent écouter.
Gros bémol sur les reprises qui n'arrivent pas à la cheville des originaux.
New Ammo reste attirant car il nous présente le saxophone d'une manière originale. Karl Denson est un artiste à part, bon saxophoniste qui s'est éloigné du mainstream jazz pour flirter avec le rock. Une musique agréable à écouter qui doit prendre une dimension exceptionnelle en concert.
Donc si vous souhaitez découvrir le saxophone sous un jour plus blues voire rock, n'hésitez pas à vous procurer New Ammo de Karl Denson's Tiny Universe.
Note: 12/20
Site de l'artiste 


 
  

vendredi 4 juillet 2014

Meilleur album jazz 2014

Jazz
Vous allez me dire que l'année 2014 est loin d'être finie, mais ça fait tellement longtemps que je n'ai pas entendu un album aussi brillant que je doute que les 6 mois à venir me réserve une surprise. Donc j'ai décidé en accord avec moi même et par adoption de ma voix à l'unanimité que Gaël Horellou avec Legacy serait le gagnant de la catégorie meilleur album jazz 2014.
Ma première "rencontre" avec Gaël Horellou date d'une bonne quinzaine d'année, à l'époque un ami saxophoniste Greg, me parle en ces termes d'un altiste issu de sa ville natale Caen: " il déchire ce gars, en plus il s'intéresse beaucoup aux musiques électroniques, ...". J'avoue qu'à l'époque, je n'avais pas trop accroché à son travail pour Cosmik Connection.
Mais je doit bien reconnaître que la ville de Caen était devenue depuis indissociable de ce saxophoniste.Le début du mois de juin étant le théatre des cérémonies pour le d-day, les projecteurs se sont à nouveau braqué sur cette ville, me faisant penser irrémédiablement à Gaël Horellou qui avait sorti début 2014 un album live enregistré au Duc des Lombards: Legacy.
L'album arrive par la poste et au déballage je suis un peu déçu, la conception graphique du titre est sympa mais les photos sont mal agencées et il n'y a pas de livret. Le digipack de base, signe d'un manque d'argent dans la production. Ce constat fait, les minutes de Legacy défilent sur la platine et l'introduction lancinante de Clifford Jordan met mes sens en éveil. Le thème, dynamique, se lance vers 2 minutes et c'est le premier solo de saxophone de l'album. La virtuosité et l'expressivité sont au rendez-vous. Les compositions sont toutes de Gaël Horellou mais c'est avec Jackie McLean qu'il signe son plus beau morceau. Le travail d'harmonie, la rythmique soutenue par le trio Déconfin au piano, Viktor Nyberg à la contrebasse et Antoine Paganotti à la batterie sont de très haut niveau. Le solo d'Horellou est exceptionnel.
Berchida's Song, une balade, nous rapproche des standards du jazz des années 60. Le pianiste Etienne Déconfin prend le chorus après les deux saxophonistes et reste assez classique dans son improvisation. Saint Leu monte le métronome dans les tempi, et le pianiste montre l'étendue de son talent. Ce morceau laisse aussi un espace à Viktor Nyberg et Antoine Paganotti pour nous faire entendre leur dextérité.
Legacy se termine sur Palace Special aux accents de blues. Pas de solo d'alto ou de ténor, c'est la contrebasse qui s'octroie la part du roi. J'aurai bien aimé un duo de saxophones pour finir, mais le morceau aurait duré comme les autres un quart d'heure et le Horellou Band ne voulait peut-être pas lasser son auditoire.
Avec Legacy, Gaël Horellou nous présente des compositions toujours mélodiques, ou le travail d'arrangement est précis. Ecoutez les chants et contre-chants entre les deux saxophones sur les thèmes. Cet hommage aux pairs du jazz est très bien rendu, et que ce soit Abraham Burton ou Gaël Horellou, ils défendent ardemment une musique moderne et entraînante. Les soli sont très bien construits et digne des plus grands. 
En 2001, Chris Potter sortait son album Gratitude, dans lequel il rendait lui aussi hommage à ses pairs. Cet album incontournable, fut le premier pour le label Verve et lui ouvrit les portes du jazz mondial comme leader et compositeur.
Legacy présente par la voix d'un altiste hors-pair en la personne de Gaël Horellou un hommage différent mais tout aussi respectueux.
J'espère que cet album, peut-être dans une moindre mesure, apportera le succès au caennais. Car ce serait bien de faire quelque chose pour la pochette...
Alors mesdames et messieurs les organisateurs de festivals, à vos agendas, ce quintet ne peut pas passer à la trappe.
Note: 16/20
Ecoutez ici 



mercredi 11 juin 2014

Made In France

Pop Française
Non, vous ne rêvez pas, je vais vous parler de pop française. Ce n'est pas anodin puisque ma discothèque en français ne doit même pas représenter 5% de mes disques. Mis à part l'intégrale de Gainsbourg, Métronomie de Ferrer et 1 ou 2 albums de Mathieu Chédid, je dois bien reconnaître que les chansons en français ne m'intéressent pas beaucoup.
Mais Gaëtan Roussel est un malin, révélé par le groupe Louise Attaque qui connut un succès exceptionnel avec le premier album éponyme, il sait faire des tubes. C'est en véritable hitmaker qu'il publia en solo son premier album Ginger sorti en 2010 et qui connut un beau succès.
Avec Orpailleur, Roussel reprend les recettes de son succès, des mélodies faciles à retenir et répétées, des textes délicats et une musique simple. Ne cherchez pas ici 3 guitares, 2 claviers et une section de cuivre. Dans quelques morceaux, des cordes viennent se frotter à la mélodie mais toujours de manière délicate, pas de façon belliqueuse comme les violons de Prokofiev dans Roméo et Juliette.
Cette simplicité du line-up s'apparente presque à du Lo-fi dans certaine chanson, la volonté du compositeur devant être de laisser le texte et le chant primer.
Orpailleur commence avec un tube : La Simplicité, les choeurs féminin font merveille. Ce titre me fait l'impression d'être un contre-point à la dernière chanson de l'album La Barbarie dont le texte magnifique, décrit sans jamais le dire le titre. Au contraire, dans La Simplicité, les chœurs martèlent le titre tout au long de la chanson. Éolienne est le premier single extrait de Orpailleur, le titre est plus produit et les chœurs sont encore de la partie. L'ambiance dub est au rendez-vous sur le titre suivant Par-dessus Tes Epaules. Le rythme s'emballe sur Cha Cha Cha avec un break digne des dancefloors. Ballade, La Poésie reste plus classique même si le texte est bien trouvé. Musicalement et surtout au niveau de la section rythmique, j'aurai préféré quelque chose de plus abouti. Orpailleur retrouve les rythmes propres à la danse. Le rock fait son apparition sur Matrice et son riff de guitare. Avec Hum Hum Hum, on se rappelle Louise Attaque mélangé à une rythmique électro.
Face Aux Etoiles, We Will Be Strong ne sont pas au même niveau que les autres morceaux, décevant pour la fin de l'album.
Mais Orpailleur révèle sa pépite sur le dernier titre La Barbarie que j'ai déjà évoqué plus haut.
L'écoute d'Orpailleur donne envie d'aller voir Gaëtan Roussel défendre sur scène cet album. Les festivals d'été commençant bientôt, vous pourrez à coup sûr trouver sur les routes de France ce chercheur de pépite émérite.
Note: 12/20
Ecoutez ici