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jeudi 27 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Débriefing

Jazz
Finalement quels sont les points positifs et négatifs qui ressortent de cette 9ème édition du festival Éclats d'émail ?
Tout d'abord les points positifs, une impressionnante diversité de styles, d'artistes et de formations. En passant des vocalistes, aux soufflants, de la guitare gypsy à l'accordéon, de la culture israélienne au jazz de la Corée du sud, la programmation du festival est super éclectique et permet de voir et écouter un véritable panorama du jazz actuel.
Ensuite c'est un réel plaisir de voir la ville vibrer au son du jazz pendant une semaine, les bars jouent de plus en plus le jeu et les institutions affichent les couleurs.
Enfin quel public ! Car on doit bien reconnaître que les artistes ont un accueil digne des plus grandes rock-stars et cela même si une portion non négligeable des spectateurs sont abonnés aux différentes salles de concerts et donc ne sont pas forcément des aficionados du jazz.
Les points négatifs sont aussi un peu liés à la programmation car s'il y a une réelle diversité d'artistes durant le festival, force est de constater que certains étaient déjà présents l'année dernière. Ainsi Shai Maestro, Lisa Simone, Élodie Pasquier, rempilaient cette année, certes avec des projets différents, mais le plaisir de la découverte n'était plus là.
Ensuite même si les musiciens que l'on a pu découvrir sont excellents, j'aurais apprécié voir une tête d'affiche. Mais j'ai ma petite idée là dessus, l'année prochaine étant celle des 10 ans du festival, Jean Michel Leygonie se réserve peut-être un peu ! Ou alors, peut-être que la date du festival ne coïncidait pas avec l'agenda surchargé des stars du jazz.
Éclats d'émail est un beau festival avec la possibilité de rencontrer les artistes, d'assister à des conférences, de voir des expos photos. C'est une grosse organisation et un véritable sacerdoce de la part du staff. Chapeau l'équipe et continuez ce travail qui permet à Limoges de se faire une place dans les villes qui comptent pour le jazz.
En conclusion il ne manque plus à ce festival qu'un tremplin jazz. Ce serait vraiment intéressant de voir sur scène 4 ou 5 artistes avec un programme court venant concourir pour obtenir une résidence à Laborie avec à la clef un enregistrement.
Je suis sûr que cette idée a déjà traversé l'esprit de Jean Michel Leygonie, alors vivement les prochaines éditions du festival Éclats d'émail.



  

mercredi 26 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Itamar Borochov

Jazz
Dernier concert auquel j'assiste pour cette 9ème édition du festival Éclats d'émail. Il s'agit du trompettiste Itamar Borochov et son quartet venu défendre sur scène la plupart des morceaux de son album Outset. Autour du trompettiste, on retrouve son frère Avri à la contrebasse et au oud, Yonathan Avishai au piano et Jay Sawyer à la batterie.


Borochov, joue avec un son légèrement voilé qui est du plus bel effet. L'inspiration des compositions et des chorus provient des artistes ayant gravé des galettes somptueuses dans les années 50-60. On pense évidemment au Miles d'avant la période électrique, à Lee Morgan, Freddie Hubbard et surtout à Clifford Brown.


Ainsi une composition comme Samsara rappelle les titres les plus populaires de ces maîtres du pavillon dans lesquels la pulsation ternaire laisse affleurer un groove que vous ne pouvez endiguer et qui envahit votre corps jusqu'à votre pied qui bat la mesure de manière imperceptible.
Borochov a un bon son et ses chorus sont enlevés, il ajoute à ces compositions fortement inspirées des années 60 de son histoire familiale. En effet la musique traditionnelle de ses origines se mélange à des tourneries plus afro américaines laissant l'auditeur voyager à travers l'Orient.

Ainsi pour appuyer le propos du musicien, son frère Avri, troque la contrebasse contre le oud. Ce mélange renvoie immédiatement à Ibrahim Maalouf, passé maître dans cette recette savante. Maalouf arrive pour moi à un mix plus abouti que Borochov. Mais ce dernier n'a pas enchaîné les enregistrements comme a pu le faire l'insatiable Ibrahim. L'expérience joue certainement une grande importance.



Itamar Borochov joue donc avec son frère Avri. Certaines fratries sont devenues très célèbres dans le jazz, rappelez-vous les frères Adderley et leur quintet prestigieux ou les frères Brecker, les chevaliers de la fusion... Ici, Avri Borochov reste dans l'ombre de son frère pour plusieurs raisons. Tout d'abord son jeu de contrebasse est assez grossier, le raffinement n'a pas sa place et encore moins la sensibilité. Cela se vérifie ensuite lorsqu'Avri Borochov prend le Oud avec une maîtrise de l'instrument plus que modeste. Clairement l'un tutoie les étoiles, alors que l'autre est resté sur la terre ferme à regarder.

Les autre musiciens se défendent bien, Jay Sawyer avec une carrure de videur de boîte de nuit fait un très bon concert. Le pianiste accompagne bien le trompettiste, mais je n'aime pas la construction de ses soli. Le manque de spontanéité de ses chorus m'a déçu.
En conclusion, un concert vraiment sympa pour les amoureux des grandes heures du jazz afro américain. Le mélange des cultures voulut par Itamar Borochov est réussi et l'on découvre un musicien accompli. Son frère va devoir travailler pour se faire un prénom car Borochov rime avec trompettiste de talent...   pour l'instant ....
Note: 14/20



mardi 25 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Giovanni Mirabassi

Jazz
Encore un pianiste dans cette neuvième édition du festival d'éclats d'émail, Giovanni Mirabassi. C'est toujours intéressant de voir à quel point avec le même instrument, on peut obtenir une si grande diversité de styles, de compositions et bien entendu d'improvisations.
Mirabassi joue ce soir dans la formule consacrée du trio avec Gianluca Renzi à la contrebasse et Lukmil Perez à la batterie.

Dès les premières notes on comprend que l'on a affaire à un pianiste habitué des clubs. Mirabassi à du affronter nombre de jams dans les clubs enfumés des capitales et avoir une connaissance exceptionnelle des standards du jazz. On sent dans son jeu et ses compositions l'importance de la ligne mélodique. Ses improvisations restent toujours très fluides et d'une construction sans faille.
Mirabassi, c'est le pianiste avec qui vous avez envie de jouer, car même si c'est un bon instrumentiste, c'est le jazz qui l'intéresse. La musique comme instant de partage avec ses musiciens et avec le public.

 
Qu'importe finalement le flacon pourvu qu'on ai l'ivresse. Ainsi Mirabassi affiche un sourire jouissif quand le contrebassiste fait une citation du Boogie Stop Shuffle de Mingus dans un solo, ou bien, il change la setlist du concert car il a envie de jouer The Man I Love de Gershwin qu'il a entendu siffloté par le directeur du festival l'accueillant à la gare de Limoges. L'hédonisme musical de Mirabassi est agréable à écouter mais les autres membres du trio ne sont pas en reste.


Gianluca Renzi est sans conteste le contrebassiste de ce festival. D'abord déconcerté par l'arbalète électrique qui lui sert d'instrument, je suis surpris par la qualité du son qui est très profond. Un instrument sans caisse avec une telle résonance c'est assez étonnant. Le contrebassiste, joue remarquablement bien. Nuances, sensibilité, précision rythmique, qualité du son et des soli sont au rendez-vous sur chaque morceau. Belle claque, Gianluca Renzi illumine la scène.


En revanche, je suis moins enthousiasmé par le batteur. J'ai ressenti comme une absence de sa part pendant une bonne partie du set. Il n'était pas en phase avec Mirabassi et Renzi. La fatigue due à l'enchainement des dates peut-être ? Bon musicien, sensible, il n'a retrouvé l'osmose avec le reste du trio qu'en fin de set. Dommage.


En conclusion, Mirabassi est un fervent défenseur de la mélodie. Que ce soit dans ses soli ou dans ses compositions, la mélodie est sa préoccupation principale. Avec sa formation en trio, il nous entraîne dans un club de jazz et nous transporte aux plus belles heures de la note bleue.
L'attachement du pianiste pour le lyrisme dans ses compositions donne envie de le voir jouer en formation plus importante. Un album avec un trompettiste et un saxophoniste serait le bienvenu.
Note: 13/20



 

vendredi 21 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Paul Lay - Mikado

Jazz
Enfin le jazz français a trouvé son beau gosse ! Oui, Paul Lay est beau sans aucun oxymore. Mais que nous vaut cette bonne mine Paul (amis de la contrepétrie...) as t-on envie de lui demander. Et une partie de la réponse se trouve certainement dans le quartet qu'il a réuni pour l'album Mikado. En effet autour de lui prennent place Antonin Tri Hoang au saxophone alto et à la clarinette basse, Dré Pallemaerts à la batterie et Clemens Van Der Feen à la contrebasse.
Le pianiste a trouvé un bel équilibre avec cette formation, on passe de compositions très "à la mode" du jazz contemporain, à des morceaux plus personnels, en passant par des moments d'une infime délicatesse et sensibilité quand Dré Pallemaerts abandonne ses collègues et que Antonin Tri Hoang attrape sa clarinette basse.


Paul Lay est à l'aise dans tous les jeux, alternant lyrisme, jeu puissant de block-chord, virtuosité de la main gauche complètement indépendante. Mais ce qui est vraiment intéressant à voir et écouter c'est l'alchimie avec le batteur. Il existe une complicité sans faille entre ces deux là. Il prennent un plaisir à jouer ensemble qui transpire dans chaque chorus. C'est assez drôle d'ailleurs de comparer leurs allures respectives: D'un côté le pianiste propre sur lui, qui donne l'apparence d'un parfait gentleman et de l'autre un batteur aux cheveux long à qui il ne manque que la chemise de bûcheron pour compléter la panoplie du look grunge !

  
Mais l'apparence est une chose, le talent, une autre car cette complicité et ce dialogue constant entre les 2 instrumentistes n'est possible qu'avec une grande virtuosité. On ne peut dialoguer si on ne parle pas la même langue et force est de constater que Paul Lay et Dré Pallemaerts s'entendent à merveille.
Cette amitié, qui, je pense dépasse la rencontre musicale, éclipse un peu le talent du contrebassiste qui pourtant fait du bon travail tout au long du set. Jeu à l'archet très propre et très beau solo sur une ballade de début de concert.


L'alchimie étant tellement présente entre le batteur et le pianiste, difficile pour le contrebassiste de trouver sa place. De même, le saxophoniste Antonin Tri Hoang, apparaît comme une pièce rapportée face à ce couple. Cependant le saxophoniste que j'avais découvert dans une autre édition d'Éclats d'émail avec l'Orchestre National de Jazz sous la direction de Daniel Yvinec ne reste pas sur le bord de la route. Il enchaîne les thèmes avec une certaine maestria et nous livre des soli bien sentis. Bon technicien je trouve qu'il devrait se lâcher un peu plus, je me suis surpris au moment de ses soli à chantonner une note harmonique que j'aurai bien voulu entendre. Son introversion apparente se lit dans son jeu. Ce qui n'est pas forcément perceptible à l'écoute d'un cd, ne peut être caché sur scène. On a envie de générosité, que ce saxophoniste nous chahute en nous étonnant.

Bien entendu, je chipote car Antonin Tri Hoang a bien jouer tout au long du spectacle et il est un des piliers des saxophonistes français de la scène jazz actuelle.
En conclusion, un bon concert avec cette jeune garde du jazz, les compositions ne sont pas toutes du même niveau mais Paul Lay sait créer un set efficace alternant les compositions, les reprises, les ballades et les rythmes plus enlevés.
Enfin, Mikado dont la plupart des morceaux on été joué sur scène a été récompensé dans la catégorie jazz par le grand prix du disque de l'académie Charles Cros.
Le meilleur moyen de féliciter Paul Lay de ce prix est donc de se procurer son disque paru sous le label Laborie Jazz. En plus Mesdames, vous aurez ainsi une magnifique photo du pianiste (haaaa qu'il est beau).
Note: 15/20
Ecoutez Mikado ici

jeudi 20 novembre 2014

Éclats d'émail 2014 / Nasheet Waits - Equality Quartet

Jazz
Deuxième concert auquel j'assiste, Nasheet Waits qui vient défendre des titres qui vont certainement sortir sans tarder sur le label Laborie Jazz. C'est une formation en quartet dans laquelle on retrouve classiquement un pianiste Aruan Ortiz, un contrebassiste Mark Helias, un saxophoniste Darius Jones et à la batterie Nasheet Waits.
Après avoir ouïe la voix de Louis (Winsberg cf article ici) faisant wah-wah, c'est un jazz beaucoup moins conventionnel qui allait frapper aux portes de mes esgourdes. Tour à tour surpris, décontenancé, admiratif et souvent émerveillé, on ne peut pas dire que la voie musicale qu'a choisi Nasheet Waits laisse indifférent.


Waits défend l'idée selon laquelle chaque musicien du quartet apporte sa pierre à l'édifice, le nom d'Equality Quartet trouve ici sa justification. Cette notion d'égalité pourrait être galvaudée dans certaines formations mais c'est vrai que le jazz qui nous est présenté, s’affranchit des structures classiques. On peut aisément comparer l'apport de chaque musicien à une touche de couleur qu'ils viendraient poser sur une toile, on est dans l'expressivité de sentiments, sensations.
Cela montre une évidente maîtrise technique de l'instrument mais aussi une assimilation parfaite de la culture musicale jazz. On a l'impression qu'ils ont tous au moins 30 ans de carrière derrière eux.


D'aucuns diront que c'est une musique élitiste et il faut bien le reconnaître... ils ont raison. Car rares sont les non-musiciens à décrypter le message musicale dans toute sa force. Il faut avoir une notion, même restreinte, de l'harmonie, du rythme, de la pratique instrumentale pour prendre un réel plaisir à écouter ces virtuoses.
Mais revenons aux musiciens qui font preuve d'un immense talent. A commencer par le saxophoniste Darius Jones dont l'apparente bonhomie contraste avec un jeu puissant, une maîtrise technique exceptionnelle des harmoniques, du growling, des doigtés alternés mais surtout un son que n'importe quel saxophoniste voudrait avoir.

  
Le pianiste Aruan Ortiz ainsi que le contrebassiste Mark Helias sont aussi très techniques. Le premier base la plupart de ses chorus sur des motifs rythmiques, je regrette de ne pas avoir pu mieux entendre sa main gauche car mon placement dans la salle pénalisait la sonorisation du piano.
Le second enchaîne les soli avec dextérité que ce soit à l'archer ou aux doigts. Je trouve que son jeu est assez froid, cela manque de rondeur, même s'il ne recherche pas le groove pour cette musique, on sent que ce n'est pas instinctif chez lui. Peut-être les travers d'une formation essentiellement classique ?
Pour finir, le batteur et fondateur de ce quartet nous prouve tout au long du set une aisance dans tous les jeux. Du toucher sensible de la cymbale à l'explosion de la caisse claire, il marie habilement les sensations. C'est un véritable esthète de la batterie, chaque frappe sert la musique, pas de fioriture.
En conclusion, un concert impressionnant mais deux détails me chagrinent, d'une part, la musique de Nasheet Waits et de son quartet est trop hermétique pour le novice et d'autre part, je regrette qu'ils n'aient pas repris un standard. Une reprise saucissonnée à la méthode Waits aurait certainement enchanté le public.
Note: 13/20


mardi 18 novembre 2014

Eclats d'émail 2014 / Louis Winsberg - Gypsy Eyes

Jazz
Concert d'ouverture officielle du neuvième festival Éclats d'émail à l'opéra théâtre. Le président du festival fait son petit discours et le spectacle commence par un guitariste en solo Rocky Gresset.
Le jeune homme est virtuose, sa guitare acoustique parfaitement sonorisée et le silence de la salle montre que le guitariste dès les premières notes à su captiver son auditoire.


Ensuite entre en scène Louis Winsberg qui nous précise que le programme du soir tournera autour de l'histoire de la guitare dans le jazz en rendant hommage aux plus grands guitaristes du genre, que ce soit Wes Montgomery, George Benson, Paco de Lucia, John Mclaughlin et bien entendu Django.
Le spectacle n'est donc pas un trio de guitares manouches pendant 2 heures. C'est un peu ce que je craignais en voyant l'affiche.
Le concert est donc très éclectique, mais il est vrai, centré sur la 6 cordes. Après quelques morceaux, Rocky Gresset prend la guitare électrique, Louis Winsberg la "guitare bleue" et une section rythmique composée de Stéphane Huchard à la batterie et Jérôme Regard à la contrebasse - basse électrique viens compléter la formation.
Sur un drive impeccable du batteur nous voilà parti sur un morceau de Wes Montgomery, la virtuosité de Rocky Grasset reste présente en mode électrique, et le plaisir de voir jouer ces musiciens est communicatif.
Jean Marie Ecay rejoint à son tour la formation et c'est sur un morceau de jazz fusion de Miles Davis qu'il donne avec Louis Winsberg l'étendue de sa maîtrise musicale. Ce morceau est véritablement l'apogée du concert avec des soli très bien construits et une section rythmique en grande forme.
Pour le titre suivant, Ecay impose un blues dans lequel être en arrière du temps prend toute sa signification, la construction du morceau est assez classique mais la réalisation est intéressante.
C'est Antonio El Titi qui enchaîne en solo avec un morceau hommage à Paco de Lucia. La salle exulte à la fin du titre. Ce musicien est un véritable prodige, pour le coup, 2 heures de musique manouche par El Titi, ce n'est pas assez !

 
Après avoir joué en duo avec Winsberg plusieurs titres dont une marseillaise joliment détournée, la formation se retrouve au complet pour les derniers titres du set.



Au final, Louis Winsberg est un très bon musicien, un amoureux de la guitare et de ceux qui la pratiquent. Il nous transmet cet amour par un hommage aux grands artistes qui ont été des piliers pour sa culture musicale. En toute humilité, les musiciens qui l'entourent jouent merveilleusement bien et prennent du plaisir à partager leur musique avec le public.
Beau spectacle, le public était conquis et le sourire et la bonne humeur d'El Titi resteront dans les mémoires.
Un bémol tout de même sur l'utilisation de la guitare midi pour faire des nappes de violon ou des accords d'orgue, Monsieur Winsberg, les années 80 sont loin maintenant et ce n'est pas la peine de conserver les pratiques sonores qui ont plombé un maximum de titres de cet époque.
Note: 15/20