Je reçois le cd sous blister, le speech était simple: tu vas voir c'est un peu world ça va te plaire. Vu que j'ai laissé de côté la world music depuis la mort de Nusrat Fateh Ali Khan en 1997, je me demande si le "ça va te plaire" n'est pas un peu trop enthousiaste !
J'ouvre le blister ou plutôt j'essaie d'ouvrir cette infamie en plastique qui résiste à tous les outils contondants dont je dispose et miracle, mes dents sont entières et je ne me suis pas coupé un doigt avec le couteau de boucher qui dans un essai ultime fut très efficace.
Pochette assez jolie avec un arbre en premier plan et une ville au fond, certainement des photos retravaillées avec les logiciels actuels pour rendre l'effet d'un dessin. Au dos de l'album, je lit la liste des titres dont une grosse partie est logiquement en hébreu. La caractéristique world ne s'acoquine t'elle pas facilement à un folklore revisité dans laquelle le mot jazz n'est là que pour intellectualiser l'ensemble ? J'ai un peu peur...
Je met la galette dans mon nouveau lecteur de cd car l'ancien avait décidé du jour au lendemain sans préavis de faire grève avec un bruit de claquements en guise de revendications et je laisse défiler les titres.
Mes craintes furent dissipées dès les premières minutes d'écoute: des thèmes, de l'improvisation de qualité, des arrangements, tout est là. Du jazz en version originale.
Le leader Yuval Amihai est à la guitare, la composition et l'arrangement, la section rythmique se compose de Gautier Garrigue à la batterie et Olivier Degabriele à la contrebasse. On retrouve aux saxophones Etienne Bouyer (critique album Oxymore ici) et Damien Fleau.
L'ensemble est très homogène et les musiciens de très bon niveau. Aucun des instrumentiste ne tire la couverture et le leader Yuval Amihai ne se met jamais en avant, il ne prend pas systématiquement les soli, l'exposition des thèmes est faite avec un son ouvert et brillant sans saturation.
Yuval Amihai Ensemble commence avec le dansant Rikud La Shalom, le ton est donné: des arrangements de cuivres ciselés, un thème travaillé mais simple à retenir, des virtuoses aux chorus.
Après Kmo Yam et Aller Simple dont le solo de ténor me rappelle le son soufflé de Rollins sur A Night Has A Thousand Eyes, vient mon morceau préféré: Kadimuchka avec un solo parfait de sax soprano soutenu par une section rythmique effervescente. A ne manquer sous aucun prétexte.
Cher Mr Wiesel met en avant le travail d'harmonie du guitariste, il utilise 2 sopranos en même temps sur des accords dissonants ce qui est plus qu'aventureux en terme de justesse. Mais comme le scandent des personnalités pour une grande marque de cosmétique: "vous le valez bien" car sans les qualités techniques du duo de saxophonistes, le morceau aurait pu se transformer rapidement en concert de klaxons en rûte majeur...
Ma Avareh résonne comme un traditionnel arrangé pour laisser libre court aux improvisations des musiciens. Je serai curieux d'ailleurs de savoir s'il s'agit d'un traditionnel, n'hésitez pas à commenter...
Après Aviv dans lequel le guitariste fait à mon avis son meilleur solo et Shmuel, Yuval Amihai Ensemble se termine par Retour. Ce titre plus calme monte progressivement en puissance jusqu'à la reprise de la mélodie par le sax soprano et finit sur le son velouté de la guitare.
Il se dégage de ce premier album un sentiment d'humilité, d'apaisement, Yuval Amihai ne nous impose pas sa culture mais transmet son histoire avec passion. Le vécu et la technique du compositeur sont au service de la musique.
En 1997 j'avais éprouvé les mêmes sensations en écoutant un jeune trompettiste assez peu connu en France, c'était Roy Hargrove et son album Habana. Souhaitons à Amihai de connaître les mêmes succès que le talentueux trompettiste.
Note: 14/20
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