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samedi 23 août 2014

Massacre à la clé de sol

Jazz
Nouvelle édition du festival d'été Musiques au Musée à Limoges. Le programme s'enrichit peu à peu mais sur le plan du jazz, reste secondaire par rapport au festival Éclats d'émail qui est devenu au fil des années, un rendez-vous incontournable des mélomanes.
Ayant déjà entendu les qualités de musiciens de Vincent Maury au saxophone et de Mathieu Tarot à la trompette, je décide d'aller voir un octet qu'ils ont formé avec d'autres musiciens et qui se produira dans les jardins de l’évêché, situés derrière la cathédrale pour les non-limougeauds. La foule est au rendez-vous, certainement plus grâce à la faveur du soleil qui a enfin montré le bout de son nez en ce mois d'août pluvieux, qu'à la présence du combo fraîchement monté.
Une charmante hôtesse me tend le programme du festival sur lequel on peut lire une brève présentation des groupes ou artistes. Ainsi pour Jazz Byte, on peut lire: "... est un mini big band vocal mordant qui réunit la crème de (...)l'orchestre régional du Limousin. Ses musiciens issus d'horizons divers (...) lui procurent une "patte" et une énergie incomparables." Alléchant non ?
Les musiciens s'installent sur la scène, c'est le chanteur Gilles Favreau qui présente le groupe en indiquant qu'ils allaient jouer des standards du swing et que le groupe avait été formé à l'occasion du festival. Il essaye de plaisanter avec le public et arrive à décrocher quelques sourires. Mais c'est sur la musique que la critique va s'avérer plus acerbe car dès la première chanson, l'approximation de la mise en place rythmique du chant s'entend. Avec en plus une reprise du thème au mauvais moment.
Soyons indulgent, il leur faut peut-être un peu de temps pour s'installer dans le concert...
Les solos s'enchaînent sans grande saveur, avec un altiste Denis Gauthier qui restera aux abonnés absent des chorus, pourquoi ? Sur une grille de blues de Count Basie, ça doit pas poser beaucoup de problèmes ... Mais encore ça ce n'est qu'un détail.
Les fins hasardeuses qui me rappellent la fameuse expression des musiciens "rendez-vous à la coda", ne sont rien comparé à ce qui m'attendait. La pire interprétation d'un standard de jazz que j'ai pu voir sur scène: Lullaby Of Birdland. Le chanteur l'annonce et je me prend à la chantonner dans ma tête, puis il donne le rythme et là je me dis que c'est plutôt lent. Effectivement, la lenteur casse la pêche naturelle du morceau, les arrangements de cuivres alourdissent encore un peu le titre. Après des soli, le chant reprend et tout le monde s'arrête à la fin du couplet ! Les musiciens se regardent avec des yeux de merlans frits et après une éternité le chanteur reprend a capella de manière humoristique... C'est du grand n'importe quoi. Après ce massacre, nouveau standard: Stompin' At the Savoy. Titre que j'avais écouter la veille interprété par le big band d'Illinois Jacquet. Mauvaise coïncidence car comparé à l'excellence du big band américain, l'octet limougeaud faisait pâle figure surtout quand le pianiste Alex Jouravsky assez peu inspiré pour ses soli oublie carrément de jouer le thème ! Je ne comparais évidemment pas le niveau des deux formations mais plutôt la façon d'approcher le standard alors quand un groupe n'arrive même pas à sortir le thème ...
Sur ce morceau je crut bon de m'éloigner pour profiter des bienfaisants rayons du soleil en m'allongeant sur l'herbe. La musique lointaine ne semblait plus si mauvaise ...
De ce spectacle navrant, j'espère que Jazz Byte saura tirer les leçons car même les écoles de musiques proposent des spectacles de fin d'année de meilleure qualité.
De deux choses l'une, soit les musiciens travaillent (et il y a du pain sur la planche) soit ils arrêtent cet octet improbable.
Note: 5/20 (normalement c'était 2 mais le tromboniste Franck Théaudin a eu quelques fulgurances)



 


mardi 5 août 2014

Sax 'n' Roll

Blues
Le saxophone est l'instrument de prédilection du jazz, quelques œuvres classiques lui donnent un peu de place mais c'est le jazz qui rend à cet instrument ses lettres de noblesse. On ne peut pas voir ou entendre un saxophone sans y associer un grand nom du jazz, Getz, Adderley, Parker, Stitt, Rollins, ... et bien entendu Coltrane. Cependant le saxophone s'est aussi illustré dans d'autres styles musicaux, la soul funk est un exemple marquant avec en tête de liste une section de cuivre dont chaque musicien a fait une carrière solo importante, j'ai nommé les JB's. Maceo Parker, Pee Wee Ellis et Fred Wesley. Même si Maceo Parker ou Pee Wee Ellis se sont lancés dans des enregistrements jazz, ils n'ont rencontré le succès qu'avec la soul funk que Mr Brown leur avait transmise. Plus pop, le saxophone de Supertramp par exemple, est vraiment un élément du groupe à part entière contribuant à la mélodie et à des solos devenus cultes.
Karl Denson, fait partie de ces musiciens qui ont tourné leur carrière musicale vers le rythme & blues. Au printemps 2014 il sort avec son groupe Tiny Universe l'album New Ammo. On retrouve sur cet enregistrement Karl Denson au saxophone mais aussi sur certains morceaux à la flute traversière. Il est soutenu par Chris Stillwell à la basse, John Staten à la batterie, David Veith aux claviers, D.J. Williams à la guitare et pour la section de cuivre, Chris Littlefield à la trompette, Andy Geib au trombone et Daniel de La Cruz au sax baryton.
New Ammo commence très fort avec Grenadiers dans lequel Denson assume un solo très rock suivi de la guitare de Williams omniprésente sur l'album. Après Three Trials Of Strength moins inspiré, le groove fait son apparition avec Hang Me Out To Dry et Karl Denson au chant. Le titre éponyme New Ammo ressemble à la construction des titres de Maceo Parker. Beau travail de section de cuivre sur le thème ou en appui derrière les solistes. The Duel est un titre de la bande originale du film CC and Company. Nanard des années 70, la musique fut composée par Lenny Stack et fait partie des innombrables pépites composées pour des films et qui surpassaient largement la valeur des images !
My Baby, composition plus classique fait rentrer au chant Nicki Bluhm. La première partie du solo de Denson me rappelle les solos de Candy Dulfer.
Avec Seven Nation Army, ça se gâte, après une introduction basse, guitare qui met l'eau à la bouche, la flute de Denson vient faire retomber le soufflé. La volonté de Karl Denson de sonner rock a certainement aiguillé son choix de prendre le morceau le plus célèbre du faiseur de rock de Nashville, Jack White. Mais sa flute semble parodier la lourdeur du titre original.
Après Ski vient relever le niveau, retour du saxophone pour Denson et petit solo de trompette. Le punchy Everybody Knows That laisse place au titre Sure Shot des Beasties Boys. Là encore l'original gagne haut la main le combat. Malgorium et son riff d'hammond suivi de pèches de la section de cuivre rappelle le James Taylor Quartet (Critique d'un album de JTQ). Très bon solo de Denson et du guitariste D.J. Williams. Ce morceau est celui que je préfère de l'album. Après Cheerleader dans lequel encore une fois le guitariste tire la couverture à son avantage, New Ammo se conclue par Odysseus. Ce titre est le plus jazz de l'album, on découvre un solo de vibraphone exécuté par Mike Dillon. Le titre assez monotone bascule en deuxième partie avec l'arrivée de la guitare électrique, toujours elle, vers un style plus percutant.
En conclusion, sur New Ammo, la présence mélodique importante du guitariste fait penser que c'est un album de ce dernier sur lequel il aurait invité Denson et son groupe le Tiny Universe. C'est dommage, le saxophoniste joue parfaitement dans le style rock et ses compositions bien que classiques se laissent écouter.
Gros bémol sur les reprises qui n'arrivent pas à la cheville des originaux.
New Ammo reste attirant car il nous présente le saxophone d'une manière originale. Karl Denson est un artiste à part, bon saxophoniste qui s'est éloigné du mainstream jazz pour flirter avec le rock. Une musique agréable à écouter qui doit prendre une dimension exceptionnelle en concert.
Donc si vous souhaitez découvrir le saxophone sous un jour plus blues voire rock, n'hésitez pas à vous procurer New Ammo de Karl Denson's Tiny Universe.
Note: 12/20
Site de l'artiste